
5, Place de l’Église
19290 Sornac
L’ŒUVRE SCIENTIFIQUE DE GASPARD MICHAUD (1795-1880)
Grâce au bulletin municipal relatant sa biographie, les sornacois connaissent maintenant Gaspard MICHAUD né à Sornac le 3 décembre 1795 (12 frimaire an IV), fils d’André Louis MICHAUD et de Marie LEGOUIX. Son père était « greffier de la justice de paix », il sera plus tard cité comme ayant été professeur au lycée d’Ussel, mais bien des points semblent nécessaires à approfondir sur sa biographie et sa généalogie .
En tant que malacologiste, Gaspard Michaud a eu une certaine notoriété au 19ème siècle dont l’éclat, jusqu’à récemment, n’était pas parvenu dans sa commune de naissance.
Contraint à une carrière militaire, il était, en matière scientifique, un amateur éclairé mais qui a collaboré avec les plus grands spécialistes de son temps.
LA MALACOLOGIE dont le nom vient du grec ancien se retrouve dans le verbe malaxer qui signifie rendre mou: c’est l’étude des mollusques, des animaux à corps mous (du latin mollis).
Les mollusques sont des invertébrés, ils n’ont pas de squelette interne ce qui les rend très vulnérables. Ils se protègent donc souvent, mais pas toujours, par une coquille. L’étude des coquilles s’appelle la CONCHYLIOLOGIE. La coquille peut être de forme très variable voire absente, cachée ou atrophiée, c’est le cas des limaces qui peuvent, selon les espèces, avoir un vestige de coquille appelée limacelle.
Les mollusques sont un EMBRANCHEMENT du règne animal composé de plusieurs CLASSES dont les plus connues sont les GASTÉROPODES (escargots, limaces, bigorneaux, bulots…), les BIVALVES ou LAMELLIBRANCHES (moules, huitres…) et les CÉPHALOPODES (seiche, pieuvre…).
LA CONTRIBUTION DE MICHAUD À LA MALACOLOGIE
Son père s’intéressait déjà aux coquillages et aurait même été en correspondance avec le grand naturaliste Jean Baptiste de MONET, chevalier de LAMARCK à Paris. L’intérêt de Gaspard MICHAUD pour les mollusques a commencé pendant sa carrière militaire. Profitant de ses voyages il récoltait des échantillons et nouait des contacts avec les malacologistes les plus réputés à Montpellier, Bordeaux, Lyon, Verdun, …. Il était membre de plusieurs sociétés savantes ; Gaspard MICHAUD a été avant tout un découvreur de nouvelles espèces et un collectionneur. Outre les espèces vivantes qu’il a étudié notamment en Méditerranée, il s’est intéressé aux fossiles de plusieurs régions : dans le Bordelais, en Champagne et dans la région de Hauterives dans la Drôme, commune connue par le Palais idéal du facteur CHEVAL. Si celui-ci a construit son palais avec des galets de l’ancien lit du Rhône, MICHAUD en a fouillé les bordures riches en fossiles.
On trouve ses principales publications (de 1827 à 1877 soit 50 ans) sur le site MolluscaBase : https://www.molluscabase.org/aphia.php?p=sourcelist
Son premier travail lui apportant une certaine notoriété à été un « Complément de l’histoire des mollusques terrestres et fluviatiles de France de J .P R DRAPARNAUD », publié en 1831. Par la suite avec son collaborateur Ange Paulin TERVER est annoncé en 1839 une Histoire des mollusques terrestres et fluviatiles. Ce projet peut être trop ambitieux, ne vit jamais le jour. Ayant quitté l’armée et s’être installé près de Lyon, il se consacra à l’enseignement sans renoncer à sa passion, il se consacra à l’étude des coquilles fossiles de la région.
Dans sa « Description des coquilles fossiles des environs de Hauterives (Drôme) », en 1855 il fit connaître un gisement de fossiles dans lequel il décrit au moins 18 espèces nouvelles. L’illustration ci-contre (Figure 1) est extraite d’un exemplaire de cette brochure dédicacée par Michaud (Figure 2), les dessins sont l’œuvre de TERVER, excellent dessinateur.
Ce site, signalé encore aujourd’hui dans le guide géologique régional, est caractérisé par une espèce nommée en son hommage : Nassa michaudi (Figure 3). Ce travail a été complété en 1862 par une: Description des coquilles fossiles des environs d’Hauterives, dans laquelle j’ai compté pas moins de 25 espèces découvertes, en 27 pages !
Parfois son enthousiasme l’amenait à décrire une espèce déjà connue mais son nom reste néanmoins associé aujourd’hui à la découverte de dizaines de nouvelles espèces.
Gaspard MICHAUD dédiait souvent ses découvertes à ses amis ou connaissances, montrant l’étendue de ses relations dans le monde scientifique. Par exemple Clausila terverii est dédiée à son ami TERVER (figure 6 sur l’illustration) ou Planorbis thiollieri (figure 9 sur l’illustration) en hommage à Victor THIOLLIERE le géologue qui lui avait dédié Nassa michaudi .
Ses descriptions sont précédées d’un résumé en latin. Cette érudition rappelle sa formation classique. Il était excellent élève et aurait eu, en 1811, au lycée d’Ussel, les compliments du recteur de Limoges pour ses vers latins. Il était sur le point d’entrer à l’école normale quand il a dû s’engager dans l’armée, après le décès de son père, pour subvenir aux besoins de sa famille (il était l’ainé de douze enfants). Il ne deviendra bachelier qu’une fois retraité de l’armée, à 50 ans !
LA POSTÉRITÉ DE GASPARD MICHAUD
Dans son hommage biographique de 1895, quinze ans après sa mort, Arnould LOCARD malacologiste et géologue lyonnais, écrit « Michaud appartient de droit à cette grande école des Draparnaud, Lamarck, Deshayes et d’Orbigny qui a si largement contribué à nos connaissances premières de la faune conchyliologique française vivante et fossile.» Il lui attribue une collection de 3OOOO échantillons qui fait encore référence. La majeure partie se trouve au musée des Confluences à Lyon, ville où il a terminé sa vie et une autre partie à Mâcon a été perdue. Mais le lien avec la Corrèze n’était pas rompu, le musée Ernest RUPIN de Brive possédait une « seconde collection Michaud » donnée par son fils Elie, malheureusement égarée elle aussi.
Les modestes mollusques nous apprennent beaucoup sur l’histoire de la vie sur terre. Ils sont de plus des marqueurs importants de la biodiversité, à l’instar de notre célèbre moule perlière de la Diège (Margaritifera margaritifera) fleuron de notre patrimoine malacologique dont la protection est devenue une priorité absolue.
Comme le héron de la fable ne méprisons pas les limaçons.
Stéphane BARBAS, sornacois et naturaliste amateur 11 décembre 2022
Sources : Arnould LOCARD. Notice biographique sur Gaspard Michaud naturaliste. Mémoires de l’Académie des Sciences, Belles-Lettres et Arts de Lyon. 1895